Histoire du Quartier des Habous
Le 13 Mars 1917, le Sultan Moulay Youssef signe l’acte par lequel le terrain nommé « B’haïr Lakrazem » passait sous statut des Habous. Ces 41.600 m² avaient été donnés au Sultan par le dénommé Haïm Ben Moshé Ben Dahan et ses associés. Dès 1917, ce terrain accueillit le Pa[1]lais du Sultan, édifié par les frères Pertuzzio. Ensuite, ont été construits Derb L’Hajib T’hami, Derb Sidna, Derb Lhoubouss proprement dit, et la Mahkama. La construction de ce quartier, par lots successifs, a duré de 1918 à 1955. Son extension nécessita ensuite l’achat de 5 ha aux héritiers Ben Dahan. Sur une idée de Samuel Biarnay, directeur de l’administration des Habous en 1916 et d’Henri Prost, urbaniste de Lyautey, cette « nouvelle ville indigène » était destinée à une population marocaine à revenus modestes. Le plan du quartier fut confié à Albert Laprade, remplacé à la fin de 1916 par Edmond Brion et Auguste Cadet. Ce dernier termina seul après 1934. Structure labyrinthique, galeries d’arcades abritant des échoppes, placettes et marchés, ruelles et chicanes font de ce quartier une vraie réussite urbaine. La qualité de l’architecture est par ailleurs visible aussi bien sur les grands bâtiments (mosquées ou Mahkama) que sur les maisons d’habitat.
Les architectes du Quartier des Habous
AUGUSTE CADET (1881-1956)
Né le 17 mai 1881 à Lyon. Architecte DPLG de l’École des Beaux Arts à Paris arts en 1912. Réformé pour cause de maladie, il est affecté en 1916 au Service des plans de villes à Casablanca et devient un collaborateur d’Henri Prost, l’archi[1]tecte urbaniste de Lyautey. Dès 1919, il s’associe à l’architecte Edmond Brion avec qui il réalisera, entre autres, le fameux quartier des Habous à Casablanca. Leur association du[1]rera jusqu’en 1935. Comme il se dénomme lui-même, il sera avant tout l’ « architecte du gouvernement chérifien » et construira pour l’adminis[1]tration des Habous de nombreuses mosquées, mais aussi la Mahakma du Pacha à Casablanca (actuellement siège de la Région Casablanca-Settat) et la Mahakma du Pacha à Rabat (siège du Conseil consultatif des Droits de l’Homme). Il fut également l’architecte de feu Sa Majesté le Roi Mohammed V et édifia les tranches 1, 2 et 3 du Palais d’Ifrane. Il meurt à Casablanca le 13 mars 1956. Auguste Cadet a laissé une œuvre insérée de manière fusionnelle dans le tissu urbain du Maroc grâce à un métissage savamment orchestré entre un décor traditionnel mauresque et une structure architecturale essentielle[1]ment inspirée de l’esthétique almohade. Le recours massif aux éléments décoratifs marocains traditionnels a re[1]donné un second souffle à l’artisanat marocain et valorisé les maallems (le maallem est le professeur et le patron d’une corporation d’artisans). De fait, Cadet a été un des acteurs importants qui ont permis aux techniques des artisans marocains de résister aux pressions de la modernité et de se perpétuer.
EDMON BRION (1885-1973)
Né le 23 Mai 1885, à Soissons. Architecte DPLG (1913) à l’Ecole Nationale et Spéciale des Beaux[1]arts. Il arrive au Maroc en 1919, et s’associe à Auguste Cadet. Sa collaboration avec Auguste Cadet durera jusqu’en 1935. Ils réaliseront ensemble le quartier des Habous à Casablanca (1918-1949), le quartier israélite de Fès (rue Bou-Khisissat,1920), 4 des agences de la Banque d’Etat du Maroc, la cité de Diour Djamaâ (1930-1932) à Rabat, l’immeuble et le passage du Grand Socco et de nom[1]breuses villas à Casablanca. En 1930, il créa le groupe marocain de la SADG (Société des architectes diplômés par le gouvernement). En 1935, il fonde sa propre agence qui est devenue une des plus importantes de Ca[1]sablanca. Il travailla beaucoup avec des entrepreneurs marocains, ce qui ne manqua pas de susciter les critiques du milieu patronal colonialiste. En 1961, à l’âge de 76 ans, il céda son agence à Jean Sachs. Il meurt le 9 juin 1973 à Saint-Gervais-les-bains. Au-delà de ses productions plus marquées par une tendance néo-marocaine, Edmond Brion a développé un style résolument moderne. Il continuera à être l’architecte de la Banque d’État du Maroc (actuelle Bank Al-Maghrib) jusqu’en 1961. Il est l’auteur en particulier de l’agence de Casablanca, monument prestigieux qui donne sur la place Mohammed V de Casablanca. Mais il est aussi considéré comme le spécialiste des cités ouvrières et concevra celle de la Cosuma, de Lafarge ou de la Socica à Casablanca ou encore celle de Bou Jniba à Khouribga. Il a également construit la mosquée d’Aïn Chock.